De « l’obstacle du transfert » à la « résistance du psychanalyste »

Geneviève Abécassis

C’est dans « Les études sur l’hystérie » (p .229 à 246) que Freud commence à pressentir et à théoriser ce qu’il en est de « L’obstacle du transfert ».

Utilisant alors la « méthode cathartique » avec- en remplacement de l’hypnose qu’il avait abandonnée- le procédé « par pression sur le front du patient » pour faire surgir les réminiscences de ce dernier, Freud rencontre un certain nombre d’échecs dont celui que nous retenons :

« Un troisième cas d’échec peut se présenter, un cas révélant quelque obstacle, non intérieur mais extérieur cette fois.

C’est ce qui se produit lorsque les relations du malade avec son médecin sont troublées, et alors ce dernier se trouve devant le plus grand des obstacles à vaincre »

Dans un premier temps, il semble que Freud impute ces troubles de la relation médecin/malade à ses patientes.

Ainsi en témoigne cet exemple :

« Chez l’une de mes patientes,un certain symptôme hystérique tirait son origine du désir éprouve depuis longtemps ,mais aussitôt rejeté dans l’inconscient ,de voir l’homme avec lequel elle avait conversé,la serrer affectueusement dans ses bras et de lui soustraire un baiser. Or, il advint qu’à la fin d’une séance ,un désir semblable surgit chez la malade par rapport à ma personne ;elle en est épouvantée,passe une nuit blanche…Après avoir appris de quelles difficultés il s’agissait,je puis reprendre le,travail et voilà que le désir qui avait tant effrayé la malade s’avère le plus proche de ses souvenirs pathogènes »

Freud nous explique :

« Dans cette mésalliance à laquelle je donne le nom de faux rapport, l’affect qui entre en jeu est identique à celui qui avait jadis incité ma patiente à repousser un désir interdit .Depuis que je sais cela,je puis chaque fois que ma personne se trouve impliquée,postuler l’existence d’un transfert,et d’un faux rapport

Chose bizarre,les malades sont en pareil cas toujours dupes. »

Toutefois,dans un autre exemple,Freud nous démontre à la limite presque par l’absurde comment c’est l’analyste lui-meme qui est cet obstacle du transfert :

« Il m’arriva de voir un beau jour échouer chez une de mes malades, le procédé par pression…je pris pour la première fois la patiente par surprise…et j’appuyais sur sa tete.Toute étonnee, elle me dit : « je vous vois là,assis sur cette chaise.C’est idiot qu’est-ce que ça peut vouloir bien dire ? » j’arrivais à la renseigner ».

Mais il va encore plus loin , nous semble-t-il , lorsqu’il affirme :

« A cote des facteurs intellectuels auxquels on fait appel pour vaincre la résistance,un facteur affectif dont on peut rarement se passer joue son role.Je veux parler de la personnalité du medecin et dans de nombreux cas c’est elle seulement qui est capable de supprimer la résistance. Ici ,comme en médecine et dans toutes les méthodes thérapeutiques,il est impossible de renoncer à l’existence de ce facteur personnel. »

La question se pose alors de voir ce qu’implique ce passage de la « personne » à la « personnalité » du médecin Ce dernier terme englobe-t-il ce que Lacan définit sous le nom de contre-transfert(dans « intervention sur le transfert »),à savoir « la somme des préjugés, des passions, des embarras,voire de l’insuffisante information du psychanalyste »,ainsi que ce que l’analyste a découvert de sa propre analyse,sa sensibilité au savoir inconscient,au sien et à celui de ses analysants ?

Alors c’est à se demander , quand Freud dit que « la personnalité seule du médecin peut vaincre la résistance », s’il n’avait pas eu de par sa clinique une certaine intuition de l’implication de l’analyste dans le transfert, mais que cette intuition, il ne pouvait la mettre en pratique et faute de n'avoir pu que" s'auto-analyser" donc dans le cas qui nous intéresse (Dora) d’en savoir un peu plus sur « ce désarroi dans lequel il tombait lorsqu’il rencontrait une tendance homosexuelle »

 

P.S Lacan parle de cette résistance comme étant celle de l'analyste dans le séminaire II, p.197, 19 Mai 1955.


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