A propos des notes
du samedi 30 novembre
Marc Turpyn
Comme vous dites,
cela foisonne de tous côtés et il est difficile de s'y
retrouver. Quelques remarques ou questions tout de même.
A propos du lien
entre animaux, le nom du Dr Ratzendorf de la page 74/177 condense Ratten
et Katzen (les rats et les chats).
Il semble qu'Ernst
affectionne les petites formules ou équation du genre "chaque
florin - un rat" ou "pour chaque couronne, un rat pour les
enfants" qui posent ou reprennent l'équivalence entre les
rats et l'argent (les autres équivalences des rats avec la syphilis
et les enfants ne font apparemment pas l'objet de semblables formulations).
Elles font penser aux commandements autour desquels tournait la grande
obsession des rats, au rembousement qu'il devait effectuer sous peine
que le supplice n'arrive à sa dame ou à son père.
Mais elles restent en même temps dans un certain flou; elles ne
comportent pas de verbe qui permettrait d'en préciser la signification.
La dernière
qu'il rapporte concerne la formule magique "Gleijsamen", celle
que Freud lui avait interprété comme l'union de sa semence
avec le corps de sa bien aimée, à laquelle il ajoute désormais:
"sans rats", mot qu'il se figure écrit avec un seul
t". Cela signifie-t-il : unir sa semence à la dame sans
la cruauté des rats du supplice? ou
bien sans argent (c'est à dire une façon de régler
la question du
mariage d'argent du père ou bien de rapprocher les courants sensuel
et tendre)? ou bien sans syphilis? Ou encore sans enfants?
Ce qui se transmet
de père en fils, c'est la faute des pères dites-vous.
Cette remarque me fait penser au mythe freudien du meurtre du père
de la horde, que nous avons déjà eu l'occasion d'évoquer
ici,
ou inversement, ce qui ne se transmet pas, c'est la jouissance du père.
La définition
que vous proposez de la neutralité de l'analyste qui ne s'attacherait
à rien en particulier me ferait plutôt penser à
celle de l'écoute flottante; je mets plutôt la neutralité
du côté de
l'évitement du jugement moral et de la suggestion. Nous ne disposons
sans doute pas toujours dans le Journal, de la façon dont Freud
intervient dans le discours d'Ernst, mais on peut penser que toutes
les élaborations de Freud sur les rats et les signifiants qu'Ernst
rapporte ne sont en effet pas pour rien dans l'avancée de cette
analyse.
Cordialement, Marc.
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Bonjour à
tous, bonjour Marc,
C'est bien amusant votre repérage du nom propre permettant de
joindre les rats et les chats : Dr Ratzendorf .
C'est vrai également que tout se monnaie pour Ernst en unités
rats. C'est sa monnaie d'échange.
Vous avez raison de souligner qu'il y a une différence entre
la neutralité de l'analyste et l'attention dite flottante, j'ai
effectué un glissement entre les deux qui mérite analyse
:-). Ce que je vais en avancer n'est peut-être que rationnalisation,
mais quand même, il me semble que l'analyste perd sa neutralité
quant à ce qu'il choisit d'entendre, mais en même temps
n'est-ce pas grâce à cette perte qu'il peut en déchiffrer
quelque chose. L'exemple que Lacan en donne, la question de l'opposition
entre mariage d'argent et mariage d'amour avait également concerné
Freud, si je me souviens bien, là aussi au sujet d'une certaine
Giséla. Je ne sais plus où j'ai lu cela, peut-être
dans la biographie de Freud écrite par Jones. A moins que ce
soit dans l'un des textes sur les souvenirs-écrans écrits
par Freud, celui où il s'agit d'un pain délicieux qui
avait dégusté au cours d'un goûter.
Pour cette question des péchés des pères, je vais
relire ce passage. C'est au début des quatre concepts fondamentaux.
Mais si on se réfère effectivement à totem et tabou,
ce péché majeur qui se transmet de père en fils,
c'est bien ce désir de la mort du père par le fils. Après
cela, comme le confirment tous les mythes de la naissance des héros,
comment chaque père ne se sentirait-il pas mis gravement en danger
par la naissance même de ses fils. il y a de quoi, quand on y
songe, avoir quelques apréhensions. A bientôt. Liliane.
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