Quatre métaphores de Freud
Pour suppléer ce qui lui fait défaut : l'appui de la linguistique

Pour décrire les associations du rêve de Dora et surtout leur mise en structure, leur mode d'organisation logique, Freud utilise trois métaphores :
Outre celle des aiguillages, donc une métaphore ferroviaire, que Freud utilise pour amorcer toute son interprétation autour de cette phrase du rêve " on peut avoir besoin de sortir la nuit ". Freud la saisit au vol pour entrer dans la champ des besoins corporels, petits et gros besoins (voir l'autre texte) mais il en avance, dans le fil de sa démonstration, trois autres, l'huître et sa perle, les guirlandes de fleurs, et les cercles concentriques.


La perle de l'hystérique

L'une est celle de la perle de l'huître fabriquée à partir du grain de sable du trauma. L'hystérique, tout comme l'huître, fabrique la perle du symptôme, en couches concentriques.
Page 61.
Freud se sert de cette métaphore pour traduire ce qu'il en est de la surdétermination du symptôme.
" Tentons maintenant de rapprocher toutes les déterminations que nous avons trouvé aux accès de toux et à l'enrouement. Au plus profond de la stratification, il faut admettre une réelle irritation organique provoquant la toux, semblable à ce grain de sable autour duquel les ostracés forment la perle. Cette irritation est susceptible de fixation, car elle concerne une région du corps ayant gardé un degré élevé, chez la jeune fille, de zone érogène. Cette irritation peut donc fournir un mode d'expression à la libido réveillée. Elle est fixée au moyen de ce qui est sans doute le premier revêtement psychique : l'imitation du père malade par compassion pour lui et ensuite les auto-accusations à cause du catarrhe… "
Freud complète successivement les autres couches concentriques, avec ses liens à monsieur K. et à Madame K.
Ce que Freud ne mentionne pas c'est que, comme en témoigne son hallucination, l'odeur de fumée, qu'elle perçoit plusieurs fois au réveil, c'est qu'avec ce rajout d'une couche concentrique, quant au sens de son symptôme, c'est à chaque fois d'une identification virile dont il s'agit. Comme elle le lui indique, ils étaient trois fumeurs, son père, monsieur K et Freud, mais elle aussi fumait, au cours de la scène au bord du lac.

Comme des guirlandes de fleurs

La seconde est celle des guirlandes de fleurs - peut-être les flueurs blanches de Dora l'ont-il inspiré - de l'ensemble des associations du rêve. Page 62 : a propos de l'infection, de l'inflammation et de son père et de Dora, Freud écrit : " je suppose qu'il s'agit ici de pensées inconscientes, tendues sur des rapports organiques préfigurés, comparables à des guirlandes de fleurs tendues sur un fil de fer, de sorte qu'on peut trouver, dans un autre cas, d'autres pensées entre les mêmes points de départ et d'arrivée. "

Les cercles concentriques autour du " mouillé "

La troisième enfin, c'est la plus riche parce qu'elle permet de regrouper toutes les associations du rêve et surtout de lui donner sens, est celle des " cercles de représentations " dont le point d'intersection se trouve être la Vorstellung - la représentation- " Mouillé ".
Ces cercles partent de la masturbation, rejoignent à la fois le mouillé /souillé de l'incontinence et de la leucorrhée, donc le mouillé est le point d'intersection de ces cercles. De là, part le catarrhe du bas (la leucorrhée et la maladie vénérienne du père, elle se déplace vers le haut, en raison de la fixation de Dora à la zone orale. Et elle s'épanouit dans les symptômes, dégoût, toux, dyspnée, enrouement.
En bas il faut aussi rajouter un cercle, (cercle rose) celui de la boite à bijoux. C'est celui du mouillé sexuel qui rejoint les perles en forme de gouttes d'eau. Les gouttes de sperme.

 


De Freud à Lacan
Un édifice, un échafaudage signifiant

Toutes ces métaphores de Freud, surtout la dernière avec ces cercles de représentations, m'ont fait penser à un passage des quatre concepts fondamentaux de la psychanalyse, celui où il aborde justement le concept de la pulsion.

" Plaçons nous aux deux extrêmes de l'expérience analytique. Le refoulé primordial est un signifiant, et ce qui s'édifie par dessus pour constituer le symptôme (c'est ce qui est schématisé avec les cercles de représentations) nous pouvons toujours le considérer comme échafaudage de signifiants. Refoulé et symptômes sont homogènes et réductibles à des fonctions de signifiants. Leur structure puisqu'elle s'édifie par succession comme toute édifice, est tout de même, au terme, inscriptible en terme synchronique ".
Lacan utilise cette métaphore d'un échafaudage signifiant pour décrire le lien du corporel et du signifiant de la pulsion. Mais ce passage peut nous servir d'une part à passer des approches de Freud à Lacan, à propos de Dora. Mais aussi à lire toutes les représentations que Freud déchiffre à partir du texte du rêve de Dora, avec toute la série mouillé :souillée, comme une riche synchronie signifiante qui alimente ses symptômes et dont le déchiffrage permettra leur disparition, celle de la toux, de la dyspnée, de l'enrouement et du dégoût.

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