Sur la conclusion

Claire Hoffman

 

 

 

Bonjour à tous,

Je suis très heureuse de reprendre le travail avec vous et tous les nouveaux venus. 

Je suis d'accord avec Lise : 'acting out' est la traduction anglaise choisie pour 'agieren' employé par Freud, traduit en français par 'mise en acte'. La particule 'out' apporte une nuance d'extériorisation, de montrer au -dehors, ce qui rejoint tout à fait ce que Lacan dit de l'acting out dans le séminaire sur l'angoisse :

" Si la gifle de Dora est un passage à l'acte, je dirai que tout le comportement paradoxal, que Freud découvre tout de suite avec tellement de perspicacité, de Dora dans le ménage des K. est un acting out.

L'acting out, c'est quelque chose dans la conduite du sujet essentiellement qui se montre. L'accent démonstratif, l'orientation vers l'autre de tout acting out est quelque chose qui doit être relevé" (23 janvier 63)

La "mise en action" de Dora (p. 89) est bien le verbe agieren en allemand. Il me semble qu'on pourrait se demander si cette rupture par Dora du traitement que Freud désigne comme une vengeance, un abandon, n'est pas un acting out justement.

Voici ce que dit Freud de cette opposition entre 'mettre en acte' et 'se souvenir' et cela à la fois dans et hors de la cure :

" Nous devons donc nous attendre à ce que l'analysé s'abandonne à la compulsion de répétition qui remplace alors l'impulsion à se souvenir, et cela non seulement dans ses rapports personnels au mèdecin, mais aussi dans toutes les autres activités et relations de sa vie présente, par exemple en faisant choix, pendant la cure, d'un objet d'amour, en se chargeant d'une tâche, en s'engageant dans une entreprise" ("remémoration, répétition, perlaboration" 1914, p 109)

A propos du terme "reproduzieren" employé par Freud et que relève Liliane, Freud l'emploie aussi pour le fait de rapporter un rêve en analyse, il dit "reproduire un rêve". Il s'agit donc de reproduire dans le registre de la parole, c'est-à-dire peut-être faire un récit au plus près du souvenir.

Je reviens à la discussion sur le transfert.

Au moment des Etudes sur l'hystérie, Freud appelle 'transferts' au pluriel toute association qui s'éloigne du souvenir pour introduire des éléments présents. Il parle d'association "erronée" qui vient brouiller la claire reconnaissance de ce qui est présent et de ce qui appartient au passé. En fait, ce qui apparait avec Dora, c'est que 'le' transfert au singulier est au coeur du travail analytique.

Le problème avec Dora, c'est que le transfert a causé l'interruption définitive du travail. C'est là qu'il montre toute sa dimension d'obstacle : le transfert est une force pulsionnelle, un investissement libidinal. Il peut basculer au service de la résistance. C'est à partir de là que Freud va réfléchir en terme de combat contre les résistances et d'un nécessaire 'maniement du transfert'.

S'il y a une opposition entre ce qui se dit et ce qui se met en acte, le transfert me parait être l'élément dynamique qui permet d'avoir accès au matériel inconscient mais pour ne pas basculer totalement dans une radicale actualisation, un maniement de la relation analytique est nécessaire.

Je continue à remonter le courant et vous livre quelques remarques sur ce que dit Freud dans cette conclusion avant d'aborder la question du transfert.

Je trouve intéressant qu'il différencie, pour ses confrères médecins, ce qui relève uniquement de la parole et ce qui relève du corps :

"Seule la technique thérapeutique est purement psychologique" (p. 84) mais la théorie, elle, tient compte du fondement organique des symptômes : c'est tout ce qui relève de la fonction sexuelle. Il y aurait là, nous dit-il, ce qui est pour le névrosé l'équivalent du toxique pour le toxicomane. Les différents aspects sous lesquels on peut approcher cette fonction sexuelle sont:

- la complaisance somatique

-la sexualité infantile

-les zones érogènes

- la prédisposition bisexuelle

Alors, si Freud dans ce texte a voulu nous montrer comment grâce à l'utilisation de l'interprétation des rêves dans la technique psychanalytique, on parvient à éclairer la formation des symptômes, à reconstituer l'histoire du sujet, on retrouve toujours au-delà le "rôle de la sexualité", le noyau pulsionnel. Il écrit aussi cette phrase incroyable : "les manifestations morbides sont pour ainsi dire, l'activité sexuelle des malades" (p. 85-86)

Pour que la technique psychanalytique puisse rester "purement psychologique", il faut nécessairement prendre en compte les manifestations du transfert c'est-à-dire la façon dont les motions libidinales du patient se manifestent dans la cure.

Voilà un petit peu comment j'ai compris cette partie du texte.

A bientôt au plaisir de vous lire.

 

 

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Ce tableau est d'Anne-Marie Letort

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